Les soirées foot, c’est sacré !

Pour discuter de la loi asile et immigration, de mécanique quantique, ou du nombre d’arbres abattus pour qu’on nous explique ce qui s’est réellement passé entre Trump et Stormy Daniels, on repassera. Là, c’est packs de bières, rosé, chips, amandes, pizzas, et télé allumée, son à fond. Aucun doute, le match retiendra toute l’attention et on me fera vite comprendre que j’emmerde le monde avec mes sujets sérieux. C’est toujours comme ça avec les copines, chaque fois qu’il y a une belle affiche.

Ça commence par une salve de textos la veille, ou le jour-même, ou par des échanges sur un groupe créé à la hâte sur Whatsapp, et en quelques coups de pouce rapides comme l’éclair la soirée est bouclée.

J’suis enfoncé dans le canapé de Caro, et on se croirait à Pierre Mauroy au cœur du virage Est tellement ça hurle. La différence, c’est qu’y a pas à affronter le froid cinglant du stade, que l’odeur de clope se mêle à celle des bougies à la vanille, qu’on a pris le temps de se coiffer et que les chants ne ressemblent en rien aux cris d’une bande de néandertaliens qui se ruent sur une proie. C’est pas que les filles savent se tenir, nan, elles sont au taquet. Mais elles gardent toujours une once de dignité.

Les soirées foot sont devenues sacrées, et qu’elles tolèrent une présence masculine est un miracle. J’observe et j’écoute. On anticipe. On pense déjà à la coupe du monde qui arrive. Alors on commente. On critique. On est sélectionneuse. On prépare les futurs rendez-vous aussi. Que la coupe se déroule en Russie est pas hyper moral. Politique. Mais c’est surtout les horaires des matches qui sapent tout. Pragmatique. Se retrouver avec des affiches à midi, 17h, ou 16h, c’est juste imaginer qu’elles sont femmes au foyer.

Elles comptent s’organiser. Hors de question de louper la moindre minute. On mise sur le temps suspendu dans certaines boites quand y a match, quand on accorde un peu de répit et qu’on s’inspire de ce qui se fait ailleurs : une employée heureuse est une employée qui bosse mieux.

Reste à savoir où et comment. La ville n’y met pas vraiment du sien. Peu d’infos sur le net. Fan Zone, pas Fan Zone. Lille entretient le flou. Rapport aux attentats peut-être. Politique. Mais on peut se retrouver dans l’appart’ de l’une, puis de l’autre. Pragmatique. Y aura peut-être pas de drapeaux qui flotteront sur une foule en liesse, d’enfants maquillés bleu-blanc-rouge, ou de mecs torses-nus, mais y aura match, et elles n’en louperont pas une miette.

Sinon, y aura les bars. Les télés sonneront plus fort que les pintes sur le comptoir, l’ambiance sera au rendez-vous, mais y aura toujours un troupeau de colosses devant l’écran qui empêcheront de profiter correctement du spectacle et qui se retourneront, l’œil torve, à chaque commentaire qui leur conviendra pas. On leur offrira un verre ou deux dans l’espoir de vivre une troisième mi-temps éthylique, on les complimentera sur leur tenue, mais on ne croira pas un instant à leur ferveur, on leur rappellera juste parfois par des sourires condescendants que c’est pas la journée de la femme, elles connaissent par cœur la musique. Nan, les bars, c’est pas encore ça. C’est comme pour tout le reste : y a du boulot.

En attendant, elles espèrent que la France les fera vibrer. Autant que le Portugal, l’Espagne, le Maroc, la Tunisie, le Sénégal, le Brésil, et tous les autres. La nation, c’est pas ce qui compte le plus. Politique. Ce qui compte, c’est de se retrouver, danser, chanter, rêver. Pragmatique.

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